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Formulaire de soins aux Personnes Agées

Analgésie classique

Littérature consultée à la date du : 31/03/2017

  • Le traitement de la douleur nociceptive commence par le paracétamol et/ou l'ibuprofène.
  • En cas de besoin, on passe relativement vite à la morphine et éventuellement au fentanyl transdermique (en cas de plaintes douloureuses stabilisées et de problèmes de déglutition).

Traitement

Sélectionné

Une information et éducation de qualité permettent une réduction de la douleur et nous pouvons donc les considérer comme une intervention thérapeutique non-médicamenteuse$​​​. 

Les interventions psycho-sociales (thérapie cognitivo-comportementale, gestion du stress, exercices de relaxation) ont, pour autant qu'elles soient réalisables pour notre groupe-cible, un effet favorable significatif sur le vécu de la douleur chez les patients cancéreux$​​.

Bien qu'il n'existe aucune preuve solide en la matière, la présence, l'accessibilité et la surveillance vigilante sont des mesures apaisent  le patient atteint de douleurs.

L'application de chaleur (par exemple dans la douleur superficielle) ou de froid (dans les douleurs profondes, douleurs associées à l'inflammation) et le massage (dans les tensions musculaires) sont des techniques réalisables qui peuvent réduire la douleur$.

Paracétamol

Le paracétamol est malgré l’absence de preuves solides pour son efficacité dans la douleur cancéreuse, le traitement analgésique de de premier choix chez les personnes âgées dans une situation palliative (voir aussi le chapitre «  Douleur et fièvre » : [indications:163]). La possible toxicité hépatique potentielle est une limite relativement moins importante dans le cadre palliatif. Cave : : il convient d’être attentif chez les patients en déficit pondéral (< 50 kg), la dose recommandée de 3 g/jour peut déjà entraîner des lésions hépatiques sévères$​​​​​​.

Anti-inflammatoires non stéroïdiens : ibuprofène

Les AINS sont souvent utilisés en cas de douleur cancéreuse. En cas de risque élevé d’effets indésirables gastro-intestinaux, il convient d’associer un IPP aux AINS$​​​​​​​​​​​​​​. Nous choisissons l’ibuprofène$​​​​​​​​​​​​​​ en raison de son bon profil efficacité/sécurité. Les doses recommandées chez les personnes âgées sont inférieures à la dose maximale recommandée.

Médicaments sélectionnés

Morphine par voie orale ou sous-cutanée

Efficacité

  • Seules des preuves limitées d’efficacité ont été apportées par des études contrôlées. 
  • Des opioïdes plus récents et plus puissants que la morphine ont été commercialisés au cours des dernières années. Leur utilisation croissante ne repose pas sur des études contrôlées versus morphine, mais est liée à des techniques de commercialisation intensive par des producteurs$​​​​​​​​​​​​​​​​​​​. Aucune de ces substances n’a montré un réel avantage en termes d'efficacité et de tolérance par rapport à la morphine$​​​​​​​​​​.

Sécurité et précautions
Les données sur la tolérance sont fondées sur des faits de piètre qualité. Les effets indésirables semblent fréquents et sont prévisibles$​​​​​​​​​​​​​​​​​​​$​​​​​​​​​​​​​​​​​​​.

  • Tous les patients utilisant des opioïdes doivent recevoir un laxatif à titre prophylactique. On commence par un laxatif osmotique. Si le résultat est insuffisant, on donne un laxatif de contact comme le bisacodyl.
  •  Les personnes âgées fragilisées sont à observer de près lors de l’instauration d’un traitement par morphine. 
    • Des nausées ou des vomissements sont courants au début du traitement, et peuvent indiquer un surdosage. Si le dosage est correct, ils disparaissent spontanément après 2 à 3 jours. Ils peuvent aussi être un signe de surdosage.
    • Une somnolence peut elle aussi indiquer un surdosage ou être la conséquence d'un effet synergétique central avec les benzodiazépines et les anxiolytiques. Celle-ci disparaît souvent aussi après 3 jours.
    • Il y a un risque de survenue d’hypopnée en cas de surdosage.
  • Il est recommandé d’augmenter progressivement la dose chez les personnes souffrant d’insuffisance rénale et l’utilisation de morphine est déconseillée en cas de DFG inférieur à 30 ml/min. $​​​​​​​​​​. Il va sans dire qu’il s’agit d’une donnée négligeable chez les personnes en phase terminale de leur vie.
  • Dans la pratique, il semble y avoir une importante variabilité interindividuelle lors de la conversion d’un certain dosage de morphine dans une dose équivalente à un autre opioïde puissant, avec un risque possible de sous-traitement ou surtraitement$​. Les tableaux de conversion proposés doivent être manipulés avec précaution$​.

Modalités pratiques

  • La dose initiale recommandée chez les personnes âgées est de 2 à 5 mg par voie orale toutes les 4 heures. Une dose initiale plus faible et/ou un intervalle d'administration plus long sont donc recommandés chez des patients âgés fragilisés$​​​​​​​​​​​​​​​​​. En cas de contrôle insuffisant de la douleur (à évaluer après 24 heures) la dose de base peut être augmentée progressivement par paliers de 25 à 50 % de la dose quotidienne (= titration)$​​​​​​​​​​​​​​.
  • Les formes à libération prolongée peuvent être prises en considération après avoir atteint une analgésie adéquate avec des doses de morphine à libération normale, non retard ( « titration » de la morphine). En cas d’accès douloureux paroxystique, on administre une dose supplémentaire de morphine à action immédiate$​​​​$​​​​$​​​​$​​​​​​​​​​​​​​​​​.
  • Si plusieurs doses supplémentaires sont nécessaires pour des accès douloureux paroxystiques d’apparition spontanée, les doses de morphine à libération prolongée seront augmentées de la dose supplémentaire totale administrée le jour précédent pour des douleurs paroxystiques.
  • L’administration sous-cutanée est également défendable. Sur base empirique, on peut administrer une dose allant d’un dixième à un sixième de la dose orale quotidienne totale$​​​​$​​​​​​​​​​​​​​​​​.

Conclusion et sélection

La morphine par voie orale est le premier choix dans le traitement de la douleur cancéreuse modérée à sévère chez le patient en soins palliatifs$​​​​$​​​​$​​​​​​​​​​​​​​​​​​​. 

Médicaments sélectionnés

Fentanyl transdermique

Indication
Alternative à l'administration orale ou sous-cutanée de morphine, en cas de douleur stable ou d'effets indésirables réfractaires (constipation, sédation) ou de troubles de la déglutition, chez un patient mobile avec une espérance de vie appréciable (chez lequel l'administration sous-cutanée de morphine est moins adéquate)$​​​​​.

Ce type de médicament ne doit pas être instauré dans la phase terminale ou en cas de nécessité d'adaptations rapides de la dose (on n'atteint des taux plasmatiques stables qu'après deux à trois applications).

La mise en route de préparations transdermiques sans utilisation préalable d'opioïdes par voie orale est difficilement justifiable$​​​​​.

Efficacité
Nous ne disposons pas de résultats d'études comparant l'efficacité du fentanyl à celle de la morphine.

Sécurité
Demi-vie longue (17 heures). Il est donc difficile de corriger la dose$​​​​​.
Risque accru d'intoxication par rapport à l'administration orale$​​​​​.
La chaleur stimule l'absorption. Une fièvre ou l'application locale de chaleur crée un risque de surdosage$​​​​​.
Emploi sûr en cas de fonction rénale ou hépatique modérément perturbée$​​​​​.
Ne pas employer en cas de cachexie$​​​​​.
La constipation est moins fréquente qu'avec la morphine$​​​​​.
L'administration d'un opioïde par une autre voie que la voie orale est parfois une alternative nécessaire, mais elle apporte peu de différences significatives en termes d'efficacité et d'effets indésirables$​​​​​.

Passage de la morphine au fentanyl
Une dose de 30 à 45 mg de morphine orale correspond à un système transdermique de 12 µg de fentanyl par heure$​​​​​ (dose équivalente, voir tableau dans la fiche du médicament). Le premier jour , administrer encore la moitié de la dose originale de morphine (il faut de 12 à 17 heures pour atteindre des taux constants de fentanyl). Si la douleur était soulagée sous traitement par morphine per os, il est préférable d’administrer une dose de fentanyl comprise entre 50 et 75 % de la dose équivalente. En cas de passage au fentanyl transdermique à cause d’un contrôle insuffisant de la douleur, on peut passer à 100 % de la dose équivalente de morphine.

Médicaments sélectionnés

A prendre en considération

La TENS (transcutaneous electrical nerve stimulation ou stimulation nerveuse électrique transcutanée) est parfois recommandée en cas de douleur superficielle locale, mais son efficacité est controversée$​​​$. Une étude chez des personnes souffrant de douleurs non-cancéreuses n’a pas montré de différence entre le placebo et la neurostimulation, mais l'effet placebo n'était apparemment pas négligeable$​​​.

Fentanyl transdermique

Indication
Alternative à l'administration orale ou sous-cutanée de morphine, en cas de douleur stable ou d'effets indésirables réfractaires (constipation, sédation) ou de troubles de la déglutition, chez un patient mobile avec une espérance de vie appréciable (où l'administration sous-cutanée de morphine est moins adéquate)$​​​​​​​​​​​​. C’est également une alternative chez les patients souffrant d’insuffisance rénale.

Ces préparations ne sont pas instaurées dans la phase terminale ou en cas de nécessité d'adaptations rapides de la dose (on n'atteint des taux plasmatiques stables qu'après deux à trois applications).

La mise en route de préparations transdermiques sans utilisation préalable d'opioïdes par voie orale est difficilement justifiable$​​​​​​​​​​​​.

Efficacité
Nous ne disposons pas de résultats d'études comparant l'efficacité du fentanyl à celle de la morphine.

Sécurité
Demi-vie longue (17 heures). Il est donc difficile de corriger la dose$​​​​​​​​​​​​.
Risque accru d'intoxication par rapport à l'administration orale$​​​​​​​​​​​​.
La chaleur stimule l'absorption. Une fièvre ou l'application locale de chaleur créent un risque de surdosage$​​​​​​​​​​​​.
Emploi sûr en cas de fonction rénale ou hépatique modérément perturbée$​​​​​​​​​​​​.
Ne pas employer en cas de cachexie$​​​​​​​​​​​​.
La constipation est moins fréquente qu'avec la morphine$​​​​​​​​​​​​.

Passage de la morphine au fentanyl
Une dose de 30 à 45 mg de morphine orale correspond à un système transdermique de 12 µg de fentanyl par heure$​​​​​​​​​​​​(dose équivalente, voir tableau dans la fiche du médicament). Le premier jour de l'emploi, administrer encore la moitié de la dose originale de morphine (il faut de 12 à 17 heures pour atteindre des taux constants de fentanyl). Si la douleur était soulagée sous traitement par morphine per os, il est préférable d’administrer une dose de fentanyl comprise entre 50 et 75 % de la dose équivalente. En cas de passage au fentanyl transdermique à cause d’un contrôle insuffisant de la douleur, on peut passer à 100 % de la dose équivalente de morphine.

Moins toxique et provoquant moins d'effets indésirables que la morphine, la méthadone peut être un bon choix comme alternative à la morphine chez des patients avec une insuffisance rénale​​​​​​​​$​. Elle est également utilisable pour le traitement de la douleur chez les patients palliatifs qui réagissent insuffisamment à la morphine ou qui en ressentent trop d'effets indésirables$​​​​​​​​​. L'instauration d'un traitement à la méthadone s'effectue de préférence en concertation avec des médecins qui ont une expérience avec ce médicament$$​​​​​​​​​, parce que cette substance présente une grande variabilité pharmacodynamique et pharmacocinétique$.

Il y a une place pour l'utilisation d’hydromorphone et d’oxycodone à libération immédiate dans le traitement de la douleur paroxystique$​​.

Rotation des opioïdes
La rotation des opioïdes dans le traitement de la douleur par opioïdes (puissants) est basée sur une forte variation interindividuelle de la réponse des récepteurs aux opioïdes et des propriétés pharmacocinétiques et pharmacodynamiques de plusieurs opioïdes puissants. Un patient qui obtient un effet trop faible ou ressent trop d'effets indésirables avec un opioïde en particulier, peut réagir avec un meilleur effet clinique et moins d'effets indésirables à un autre opioïde puissant. C'est parfois le cas en pratique$​​​​​​​​. Le passage (rotation) d'un médicament à un autre requiert l'utilisation de tables de conversion qui ne sont toutefois pas toujours fiables$​​​​​​​​.  L'aide d'un spécialiste en algologie est recommandée$​​​​​​​​.

Oxycodone
L’oxycodone est disponible en formulation à libération prolongée. 10 mg d’oxycodone orale équivalent à 20 mg de morphine orale. Ce médicament n'offre pas d'avantages particuliers par rapport à la morphine, ni en termes d’efficacité ni en termes d’effets indésirables$​​​​​​​​. En comprimés instantanés à dissoudre, l’oxycodone n’a aucun avantage ni par rapport à la morphine à libération immédiate, ni par rapport à l’oxycodone à libération prolongée$​​​​​​​​. La forme parentérale n’est pas remboursée.

Méthadone
Moins toxique et provoquant moins d'effets indésirables que la morphine, la méthadone peut être un bon choix comme alternative à la morphine chez des patients avec une insuffisance rénale$​​​​​​​​. Elle est également utilisable pour le traitement de la douleur chez les patients palliatifs qui réagissent insuffisamment à la morphine ou qui en ressentent trop d'effets indésirables$​​​​​​​​. L'instauration d'un traitement à la méthadone s'effectue de préférence en concertation avec des médecins qui ont une expérience avec ce médicament$​​​​​​​​$​​​​​​​​, parce que cette substance présente une grande variabilité pharmacodynamique et pharmacocinétique$.

Hydromorphone
L’hydromorphone est indiquée pour le soulagement de la douleur sévère et persistante. Un nombre très limité d’études est publié pour cette indication$​​​​​​​​$​​​​​​​​$​​​​​​​​. L’administration d'hydromorphone peut être envisagée en cas d’effets indésirables intolérables de la morphine$​​​​​​​​. L’hydromorphone orale est environ 5 fois plus puissante que la morphine par voie orale. Il n’existe toutefois aucune preuve permettant de la considérer comme un premier choix au lieu de la morphine dans le traitement de la douleur chronique sévère dans le contexte palliatif$​​​​​​​​$​​​​​​​​.

Non sélectionné

Le fentanyl sous forme sublinguale est utilisé dans le traitement d’accès douloureux paroxystiques. Il agit assez rapidement (10 minutes). Le fentanyl sous forme orale et nasale semble, sur base d’une étude randomisée et contrôlée limitée, être efficace pour le traitement d’accès douloureux paroxystiques en cas de cancer. L’effet après 15 minutes semble meilleur qu’avec la morphine par voie orale. L’avantage par rapport à la morphine par voie orale ne l’emporte toutefois pas face au surcoût substantiel$​ (les deux produits sont très coûteux et ne sont pas remboursés). La forme nasale n’est pas disponible en Belgique. Il y a bien une forme sublinguale et une autre pour utilisation buccale$​. 

La codéine, une prodrogue dont le principal métabolite est la morphine, potentialise l’effet du paracétamol et n'est utilisée qu’en association avec celui-ci. L’efficacité de l’ajout de codéine ou la codéine seule dans le traitement de cancers n’a été évaluée que dans des petites études ou études non fiables d’un point de vue méthodologique$. Le taux de métabolisation de la codéine n'est pas individuellement prévisible. Des doses habituelles de codéine peuvent générer des taux toxiques de morphine$​​​. La codéine atteint son plafond analgésique à la dose de 360 mg. Cela signifie que des doses plus importantes n’apportent pas d’effet analgésique supplémentaire, tout en augmentant les effets indésirables. Nous déconseillons dès lors l'utilisation d'une préparation combinée de paracétamol et de codéine$​​​.

Le tramadol est approximativement cinq fois moins efficace que la morphine$​​ (5 mg de tramadol = 1 mg de morphine) et n’est pas plus actif que l’association de codéine et de paracétamol$​​. Le tramadol peut également provoquer de nombreuses interactions médicamenteuses $​​ et bon nombre d'effets indésirables (comme les autres opioïdes), et sa métabolisation est imprévisible$​​$​​$​​. La place du tramadol dans cette indication semble limitée$​​. Il existe une dose plafond (400 mg/jour) pour le tramadol. Le tramadol n'est pas une alternative à la morphine en cas de douleur sévère$​​. L'association fixe de tramadol et de paracétamol n'est pas une alternative adéquate à l'association libre de paracétamol et de codéine$​​.

Nous déconseillons l’emploi du tramadol$​​$​​$​​.

Nous déconseillons ce médicament en raison du manque d'arguments et de l'impossibilité de le titrer.

L'ajout de naloxone à l'oxycodone permet de s'opposer à l'effet constipant de l'oxycodone sans nuire à l'effet analgésique de l'oxycodone$​​. L'ajout de naloxone ou de méthylnaltrexone à un opioïde puissant est envisageable en cas de constipation rebelle malgré des laxatifs classiques correctement dosés$​​$​​. L'emploi de cette molécule en association avec l'oxycodone n'est pas intéressant parce que le titrage propre des deux substances associées n'est plus possible.

Nous déconseillons l'utilisation de divers analgésiques avec un mécanisme d'action similaire : en général, une dose accrue d'un produit est préférable à l'association de deux produits similaires ayant le même mécanisme d'action. Il n'existe que peu d'études de qualité sur l'association de divers opioïdes, et les preuves qu'elles apportent sont faibles pour les associations étudiées morphine/oxycodone et fentanyl/méthadone (grade C et grade D)$​. Si une telle prescription est envisagée malgré tout, il peut être utile de faire appel à un médecin appartenant à une équipe de référence multidisciplinaire ou à un algologue.

La buprénorphine est un agoniste partiel des récepteurs aux opioïdes et peut (à forte dose) réduire l'efficacité d’autres analgésiques opioïdes administrés ultérieurement, ce qui rend impossible le recours à des doses intermédiaires de morphine comme médicament de recours et contraint à l’utilisation de plus fortes doses de morphine lors du passage à d’autres opioïdes puissants tel que la morphine. En raison du manque d'expérience et d’études comparatives fiables, la place éventuelle de la buprénorphine transdermique dans le cadre palliatif reste à déterminer$$$​.

Nous déconseillons dès lors la buprénorphine.